Originaire du Japon, le triton à ventre de feu est un urodèle fascinant et facile à maintenir. NAC Magazine vous fait la présentation de l’espèce et des différentes « races » (ou sous-espèces).
Qui est le triton japonais à ventre de feu ?
D’une taille de 9 à 13 cm, Cynops pyrrhogaster est assez trapu et « granuleux ». Il est aussi plus grand. Ces caractéristiques le rendent facile à différencier de son cousin chinois également maintenu en aquarium, le triton chinois Cynops orientalis.
Sa peau, d’un beau noir ou brun chocolat, est rugueuse et granuleuse. Sa tête est rectangulaire, plus longue que large, à museau court et tronqué. A chaque extrémité du pli gulaire (à la base du cou), on distingue une grande glande globulaire lisse. Le dos, presque arqué et à l’arête vertébrale peu prononcée est robuste.
Autre détail à retenir : la queue présente un bout pointu. Chez les mâles en période de reproduction, elle arbore généralement une nuance bleu mauve iridescente caractéristique, et s’orne d’un petit filament à son extrémité.
Autre différence notable, les glandes parotoïdes, à l’aspect comprimé, sont très visibles, donnant à l’arrière de la tête un aspect renflé et bien carré. Chez les mâles, le renflement de ces glandes se prolonge par un bourrelet dorso-latéral et un bourrelet ventro-latéral (de l’aisselle à l’aine).
Le ventre se pare toujours d’une vive couleur orangée aux taches brunes, elles-mêmes parfois mouchetées de blanc comme un ciel étoilé.
Les femelles sont plus imposantes que les mâles. La taille moyenne des femelles et de 10,4 cm, pour seulement 8,65 cm chez les mâles. Le dimorphisme sexuel est également visible au niveau du cloaque, qui est moins enflé chez les femelles.

Différentes « races » ou sous-espèces
Des scientifiques japonais ont étudié Cynops pyrrhogaster durant de longues années et ont classé cette espèce en six différentes sous-espèces, ou « races », définies selon la répartition géographique, des caractéristiques physiques et des variations comportementales.
Tout comme le terme de race ou de sous-espèce, les critères les définissant peuvent ne pas être jugés valides par certains experts et être sujets à polémique. De plus, chaque individu présentant des patrons de couleurs uniques, il est très difficile, surtout pour le néophyte, de savoir à quelle race ou sous-espèce appartient son Triton japonais s’il ne connaît pas sa provenance géographique. Les spécialistes ont toutefois noté les caractéristiques les plus représentatives définissant chaque « race », données ici à titre indicatif.
La race Atsumi
Elle tient son nom de la péninsule d’Atsumi, dans la préfecture d’Aichi, au sud-est de Nagoya, dans la région de Chubu. Le corps est généralement de taille plus petite. Une raie rouge court le long du dos, ainsi que deux rangées de taches rouges dorso-latérales. Pendant la période de reproduction, la queue des mâles ne présente pas de nuance bleue mais conserve toujours le petit filament à son extrémité. Il est dit que la race Atsumi est plus aquatique que les autres.
La race Kanto
On la trouve dans la plaine de Tokyo. La queue est plus courte et plus haute, et son extrémité est plus arrondie. Durant la parade nuptiale, les femelles ont tendance à mordre les mâles. Cette race, qui offre une grande variabilité génétique, est composée de deux populations, l’une basée au nord, à Iwaki, et l’autre à Hachioji. Ces deux populations sont séparées par des montagnes. Ainsi, il est probable que les Kanto d’Iwaki ne se reproduisent jamais avec les Kanto d’autres endroits. Autre particularité, les femelles Kanto sont incapables de récolter les spermatophores des mâles Tohoku.
La race Tohoku
Distribuée au nord de Honshu, les couleurs de cette race sont les mêmes que pour la race Kanto. Ces tritons sont de grande taille. Au niveau de la coloration ventrale, on la différencie au nombre plus important de taches sombres regroupées en lignes, placées latéralement, laissant beaucoup de place à la couleur orange au milieu. Les femelles Tohoku restent insensibles aux tentatives de reproduction des mâles Kanto.
La race Hiroshima
Elle est répartie sur les îles de Kyushu, Shikoku, Oki et dans la région Chugoku sur l’île de Honshu (partie occidentale de Hondo). La taille est un peu plus grande, sauf pour ceux de la préfecture de Kagoshima. La couleur ventrale est très variable selon les individus : alors que certains perdent les taches ventrales, d’autres sont au contraire bien mouchetés. En période de reproduction, les mâles ne présentent pas le petit filament au bout de leur queue.
La race intermédiaire
On la trouve au centre de Honshu, à l’ouest dans la région de Chubu (parties centrales de Hondo) et le Kinki méridional (au sud-est d’Osaka, d’Isé à l’extrémité méridionale de Hondo). Le dos est d’un brun profond presque noir. La répartition des taches sombres sur le ventre est très variable selon les individus.
La sous-espèce Sasayama ou race Tamba
Même si ce n’est pas l’avis de tout le monde, celle-ci est souvent définie comme sous-espèce tant les différences sont flagrantes : Cynops pyrrhogaster sasamayae. Sa distribution s’étend dans le Chugoku oriental, dans la région de Kinki, au nord de Kobé. La principale caractéristique des Sasayamaest surtout comportementale : juste avant l’accouplement, tandis qu’il remue sa queue en S en direction de la femelle pour lui soumettre ses phéromones, le mâle lui pose un pied sur le dos ou le cou (voir photo). La robe est également différente. On remarque deux lignes noires irrégulières courant jusqu’au ventre, dont la coloration présente des petites taches claires sur fond noir. Un patron très différent du traditionnel modèle « ventre orange tacheté de noir ».
Le mystère du ventre de feu
En 2003, des scientifiques japonais ont tenté de savoir ce qui faisait la couleur flamboyante du ventre de Cynops pyrrhogaster. Si on sait « pourquoi » – c’est un animal toxique –, on ne savait pas « comment » !
Juste après la métamorphose, l’abdomen des tritons japonais est plutôt crème et se colore progressivement au fil de sa croissance. À l’état adulte, la peau à cet endroit est composée de trois sortes de cellules pigmentaires : les mélanophores, les xanthophores et les iridophores.
Ce sont les xanthophores qui sont responsables des nuances variant des pigments jaunes à rouges. Mais ces pigments ne sont pas les plus importants pour la flamboyante coloration ventrale des tritons !
Comment font donc les tritons pour arborer un ventre ni rouge ni jaune mais teinté de subtiles nuances orangées qui peuvent varier au cours de leur vie ? Pour cela, il doivent faire appel à des pigments intermédiaires… mais qu’ils ne peuvent pas fabriquer eux-mêmes !
Pour en savoir plus, les scientifiques ont alors analysé le régime alimentaire des juvéniles après la métamorphose. Ils ont fini par trouver la réponse à leur question : c’est dans une nourriture variée riche en crustacés comme les artémias ou les gammares, par exemple, que les Tritons japonais trouvent les flamboyants pigments, les caroténoïdes, qu’ils stockent ensuite dans les xantophores.
Chez les tritons, la couleur orange n’est donc pas due à un mélange de pigments jaunes et rouges : son intensité dépend directement de la taille et du nombre de granules de caroténoïdes qu’ils trouvent dans leur nourriture à l’état de juvéniles. Il en est de même que pour les flamants roses, les saumons et les homards, par exemple.
Par Marie-Sophie Germain
Catégories :AQUARIUM, AUTRES NAC