BIOLOGIE

Les chromosomes sexuels insolites de la souris pygmée


Le règne animal est toujours source de nouvelles découvertes et de surprises. Les plus petits animaux ne font pas exception à la règle et les souris pygmées (Mus minutoides) se montrent notamment surprenantes d’un point de vue génétique, et plus particulièrement au niveau de leurs chromosomes sexuels.

 

Petits rappels génétiques 

Avant de rentrer dans le vif du sujet avec nos petites pygmées, un bref rappel des bases génétiques. Chacun d’entre nous porte dans chacune de ses cellules son patrimoine génétique. Ce patrimoine est lisible sous forme d’ADN dont les brins forment nos chromosomes. Les spermatozoïdes et les ovules sont les gamètes mâles et femelles qui après fécondation seront à l’origine d’un individu avec 50% du patrimoine venant du père et 50% venant de la mère. Chez la majorité des mammifères, nous retrouvons le schéma suivant :

  • Chromosomes sexuels  XX : l’individu est une femelle
  • Chromosomes sexuels  XY : l’individu est un mâle

Lors de la fécondation, nous avons donc 50% de chance d’avoir un mâle à la naissance, et 50% de chance d’avoir une femelle :

Papa
Maman
XY
XXX (25%)XY (25%)
XXX (25%)XY (25%)

Le sexe est donc déterminé par l’apport du papa : le vaillant spermatozoïde portera soit le chromosome X, soit le chromosome Y, tandis que la maman ne détient que le chromosome  X en deux exemplaires et ne pourra donc donner que celui ci à son enfant.

De façon simplifiée, le chromosome Y détient la capacité à mettre en place l’ensemble des bouleversements pour l’arrivée d’un petit garçon grâce notamment à un gène en particulier, appelé le gène SRY, et bien entendu présent sur le chromosome Y.

Le cas de la souris pygmée 

Nous retrouvons chez nos souris pygmées le même schéma : XX pour les femelles et XY pour les mâles. Mais un troisième et un quatrième types sont disponibles et bien représentés : des femelles XX* et d’autres encore… X*Y !

En effet, ces minuscules rongeurs font partie des représentants porteurs de ce chromosome X* dit féminisant, qui permettrait à lui seule de rendre femelle un individu pourtant porteur du chromosome Y. Mais alors comment est ce possible ? Il semblerait que cet insolite X* inhiberait l’action du gène SRY et permettrait alors le développement d’un individu femelle plutôt que mâle.

Un problème se pose pourtant. Revenons à notre petit tableau en prenant cette fois ci un mâle XY et une femelle X*Y :

Papa
Maman
XY
X*X*X (25%)X*Y (25%)
YXY (25%)YY (25%) létal

Nous obtenons alors 25% de femelles X*X, 25% de femelles X*Y, 25% de mâles XY et 25% d’individus YY qui ne seront pas viables. Mais alors comment ces individus X*Y se sont-ils maintenus dans la nature alors qu’un quart de leur progéniture, en moyenne, ne pourra guère survivre ? Tout simplement grâce à d’autres avantages non négligeables : ces femelles atteignent leur maturité sexuelle plus jeunes et leurs portées comptent en moyenne un petit de plus que la normale… autant d’atouts qui ont permis à ces femelles incroyables d’être finalement tout aussi bien représentées dans la population des souris pygmées !

Et il semblerait que ce ne soit pas tout… nous vous livrerons dans un prochain article d’autres caractéristiques propres à ces « superfemelles » !

Par Audrey Pion

Photo : BioLib